jeudi 16 décembre 2010

Ça va mieux en le lisant...

On a adoré le ton ravageur et roboratif de cet article. La demoiselle n'a rien a perdre dans l'affaire et ça se sent dans les mots qui tranchent et qui cognent.
Et mine de rien, la plupart des écueils de la gestion moderne des espaces verts est passé en revue. De la quasi-brutalité des machines employées aux performances disproportionnées par rapport aux enjeux et objectifs, jusqu'à l'absurdité de la gestion d'espaces dont on ne peut même plus jouir.
Du travail brutal, austère jusqu'à l'os, couteux jusqu'à la moelle et pour un résultat inexploitable.
Plus bête, tu meurs. Et pourtant si vrai !

On aurait bien voulu être aussi radical (et juste!) parfois mais (déformation professionnelle oblige?) on n'a pas autant lâché les chevaux.
Alors bonne lecture.

Cliquez donc ici.

lundi 13 décembre 2010

L'arbre de Noël anti-cancer

Un arbre de Noël écologique ? C’est possible ! Et on peut même faire encore mieux !


Ceux qui connaissent nos préconisations visant à favoriser la biodiversité et de façon plus générale notre patrimoine naturel savent que nous recommandons fortement l’utilisation et la plantation des espèces végétales sauvages et locales. Leur adaptation aux sols et climat régionaux font des arbres et arbustes autochtones des plantes idéales en tous points.

Attrait optimal pour la faune locale (insectes, mammifères, oiseaux, etc.) loin devant les espèces exotiques et variétés horticoles, mais aussi robustesse et résistance, entretien minimal et même prix les plus bas en cas d’achat en pépinière. Alors pourquoi s’en priver ?

Les sapins de Noël vendus avant les fêtes sont des conifères, généralement des épicéas (Picea abies) et parfois des sapins vrais. Dans tous les cas, ce ne sont pas des espèces poussant naturellement en plaine. Pourtant, elles ont parfois été plantées abondamment hors de leurs aires de répartition originelle (zones montagneuses). D'ailleurs, les forêts exemptes de conifères sont devenues vraiment rares en France. Même des forêts réputées comme celle de Fontainebleau sont concernées (en l'occurrence avec des Pins sylvestres, Pinus sylvestris).

Nous savons désormais que ces plantations denses de conifères ont des impacts négatifs sur la flore et la faune locale. En effet, la dégradation de leurs aiguilles dans la litière nécessite la production d’acides puissants émis par des champignons. Il s’ensuit une acidification du sol néfaste à la majorité de la biodiversité locale.

Nous vous proposons donc des alternatives via d'autres espèces qui croissent naturellement en plaine. Elles éviteront ainsi en dehors des régions montagneuses, la culture ou la replantation (fausse bonne idée sauf avec des espèces locales) de végétaux peu attractifs pour la biodiversité dans les jardins, les forêts, les espaces publics, etc.

L’if (Taxus baccata) est l’un des rares conifères de plaine. Connu depuis les débuts de l’histoire, c’est une espèce dont on utilisait le bois pour réaliser les plus redoutables arcs. Les forêts riches de cette espèce étaient considérées comme des arsenaux !

Rappelez-vous ! A Azincourt, les archers anglais ratatinèrent la cavalerie française dont l'orgueilleux sentiment de supériorité méritait peut-être une remise en cause radicale. Défaite quasi roborative puisque les français changèrent de stratégie rengainant l'héroïsme crétin des charges bourrines pour dégainer la fourberie terriblement efficace des nouvelles armes à feu. La France remporta la guerre mais l'If avait tout de même payé un lourd tribu pour contribuer malgré lui à décimer les hommes.
Son aire de répartition fut ainsi réduite à tel point que l'if disparut de nombreuses régions dans le milieu naturel. A part dans les cimetières et quelques jardins de prestige, plus question de le trouver. Ce sont donc les armes à feu qui ont sauvé l'espèce en la rendant obsolète...

Il faut aussi remarquer que les propriétés antithétiques de l'if ont entretenu une ambiguïté certaine. Il symbolise autant la mort que la résurrection d'où sa traditionnelle plantation dans les cimetières.

D'une part, toute la plante est toxique à l'exception de la partie charnue rouge des fruits appréciés des oiseaux mais aussi des hommes (mais attention aux graines!). D'autre part, sa longévité légendaire (jusqu'à 2000 ans !) et sa forte capacité à rejeter de souche ont alimenté sa réputation de vigueur.

Mais d'autres caractéristiques lui confèrent de nombreux avantages dignes de redorer son blason.
Concernant la biodiversité d'abord (on ne se refait pas !).
Comme nous le rappelle l’OPIE (Office pour les insectes et leur environnement), il abrite une faune spécifique et diversifiée même si moins abondante que d’autres arbres locaux. On dénombre tout de même 8 espèces différentes d’arthropodes liées à l’if.

Et maintenant, pour le bon plaisir des humains.
Au jardin, l’if peut se replanter en haie (à la place des thuyas qui dans notre région ne nourrissent spécifiquement qu'une seule espèce d’insecte) ou en sujet isolé. Il est réputé pour bien supporter les tailles lui conférant des formes excentriques et ornementales. On le retrouve encore abondamment dans les jardins de prestige. En tant qu’arbre de Noël, il peut encore remplacer les épicéas ou les vrais sapins. Il ne perd pas ses aiguilles en hiver et se pare en outre de baies rouges du plus bel effet en automne.

Encore un atout. Sa croissance assez lente autorise de le planter dans un grand pot. On peut alors le maintenir à taille modeste par des coupes régulières afin de l’utiliser tous les ans pour les fêtes. Plus besoin de racheter, même plus besoin de (souvent mal) recycler.

Cerise sur le gâteau, la médecine moderne lui a découvert un avantage pachydermique capable de rattraper ses méfaits ancestraux. On extrait du conifère une molécule anti-cancer très efficace appelée "Taxol". Pour en savoir plus, nous vous proposons de visiter le site de l’association « Collect-if » qui explique toute la démarche de collecte gratuite des coupes d’if. Vous êtes concernés si vous avez des ifs ou si vous voulez planter cette espèce traditionnelle.

Avec l'if, nous avons donc bien affaire à un arbre de Noël anticancer. A deux pas de chez nous. Terrible, non ? Et dire que nous éradiquons les plantes de nos régions sans imaginer les potentiels services rendus...


Autre arbre de Noël alternatif, le superbe Houx (Ilex aquifolium), autre espèce autochtone, possède les mêmes qualités ornementales que l’if : feuilles persistantes et baies rouges (à condition de choisir des pieds femelles). Il peut aussi se planter en haie ou en ornement. La croissance de cet arbuste n’est pas trop rapide, ce qui évite d’avoir à le tailler souvent.

Ces deux espèces peuvent donc se planter dans les espaces publics à la place des autres conifères non locaux dans le but d’être décorés chaque année à Noël.

Enfin, voici une proposition lue dans le magazine « les 4 saisons du jardinage bio » . Pour ceux et celles qui ont la fibre artistique, vous pouvez réaliser une structure pérenne à base de branches et bâtons de bois mort que vous aurez sélectionnés et collectés pour leurs formes esthétiques. Après assemblage et fixation sur un support, libre à vous de décorer cette sculpture de Noël. Vous pouvez encore utiliser une plante locale en laissant grimper dessus du lierre (au feuillage persistant et qui se bouture facilement. Relisez nos articles précédents sur le lierre) qui supportera en outre la vie en intérieur.

On espère que vous apprécierez les astuces. Essayez et racontez-nous !

PS: entre autres sources utilisées pour cet article, je recommande la lecture du livre suivant: "Histoires d'arbres - des sciences aux contes" par Philippe Domont et Edith Montelle. Editions : Delachaux et Niestlé et Office National des Forêts.

vendredi 10 décembre 2010

Idées reçues sur le lierre - 3ème partie.

Suite de notre fervent plaidoyer en faveur de la liane la plus redoutée de France (voir épisode précédent).

Le lierre est une plante à l'anatomie assez fascinante: pouvant mesurer de 20 à 30 m, il est aussi long que la plupart des arbres même s'il n'atteint pas souvent les mêmes hauteurs.
Il possède aussi 2 types de rameaux parés de feuilles aux formes très variables. Ceux qui portent des fleurs sont munis de feuilles simples, ovales en général, les autres portent des feuilles lobées parfois presque en étoile.

Enfin, particularité non réservée aux plantes tropicales, il s'agit d'une liane. Ce n'est d'ailleurs pas la seule que l'on rencontre en France à l'état sauvage.
Citons la Clématite des haies (Clematis vitalba), la Vigne (rarissime à l'état sauvage), le Chèvrefeuille des bois (Lonicera periclymenum) et le Houblon (Humulus lupulus) pour les espèces les plus connues, mais aussi la Bryone dioïque (Bryonia dioica) , la Cucubale à baies (Cucubalus baccifer), la Morelle douce-amère (Solanum dulcamara), plusieurs espèces de Vesces (Vicia sp.) ou Gesses aux superbes fleurs (Lathyrus sp.), le Gaillet gratteron (Galium aparine), etc. Largement de quoi remplir un autre article.

Arrêtons nous un moment sur le cas de l'une de ces espèces. Il faut noter que le Chèvrefeuille des bois bénéficie d'une bonne réputation en raison du parfum de ses belles fleurs. Cependant, il est le seul à réellement étrangler les jeunes branches des arbres et arbustes. On remarque parfois dans les bois, les tiges vrillées de celles qui lui ont résisté... C'est lui le coupable !


Le dessin ci-après montre l'évolution conjointe d'une branche d'arbre sur laquelle une liane de chèvrefeuille grimpe.
La bataille est serrée, c'est le cas de le dire. L'étreinte de la liane sculpte la branche en spirale. Tantôt, la branche cède et finit étouffée : la sève ne peut plus passer. Tantôt elle l'emporte en parvenant littéralement à pincer et sectionner la liane (4). Malgré tout, la forme spiralée demeure visible longtemps après la décomposition du chèvrefeuille conférant un caractère féérique au végétal vrillé.

Ceux qui nous lisent depuis un petit bout de temps savent que nous ne rechignons pas à manier l'ironie. Certes, le lierre possède de nombreuses qualités. Pourtant, pour être honnête, il faut tout de même lui reconnaître un léger inconvénient.

S'il ne nuit pas aux arbres, il faut se méfier de lui sur les bâtiments, en particulier les vieux murs. Et le comble : c'est justement là qu'on le tolère le plus aisément ! Une réminiscence esthétique du romantisme ?
En effet, dès que le mur n'est plus lisse ou que le crépi est crevassé, le lierre risque de s'insinuer dans les failles et faire exploser ou disjoindre les pierres. Les vieux murs dont les pierres sont souvent liées avec des mélanges plus ou moins riches en terre lui fournissent en outre un substrat dans lequel il peut développer de nouvelles racines.
Il peut alors repousser plusieurs années de suite, même si on l'arrache tous les ans. Il faut dans ce cas veiller à couper tous les jeunes rameaux plusieurs fois par an pour ne pas en laisser grossir le diamètre. Mais pour n'avoir jamais cessé d'œuvrer sur les vieux murs de la maison de mes parents, je vous souhaite vraiment bon courage si c'est votre cas !

Vraiment, la plante mérite plus juste traitement que celui réservé jusqu'alors. Elle a tant à offrir à nos forêts, nos haies, nos jardins : richesses naturelles, poésie... Oserais-je même tendresse amoureuse ? Il faut la voir s'agripper aux arbres. Non. Que dis-je ! Elle les embrasse, les enlace, les choie, les caresse. Et quand vient pour eux le temps de la sénescence et de la décrépitude, elle redouble de ferveur et de passion exubérante déployant tous ses charmes en une croissance fougueuse.
Ce n'est pas exactement le traitement que nous réservons aux personnes âgées dans nos sociétés au regard de l'état de certaines maisons de retraite...

Mais pour terminer sur une note plus romantique dont j'assume parfaitement le côté fleur bleue, je connais bien deux amoureux dont les alliances sont ornées de feuilles de lierre. Leur devise est celle de la plante :

"Je meurs ou je m'attache."


dimanche 5 décembre 2010

Patience...

Je suis en retard sur je ne sais quel horaire que personne ne m'a fixé. Mais la 3° partie de l'article sur lierre arrive d'ici peu ! Allez, disons dimanche ! Encore un peu de patience... Merci à tous pour vos encouragements.

samedi 27 novembre 2010

Les feuilles mortes se ramassent à la pelle...

... mais c'est quand même bien plus simple au râteau...



Question : que faites-vous de vos feuilles mortes, lorsque l'hiver approchant les descelle de leur support pour les répandre en une couche épaisse sur votre belle pelouse fraîchement fauchée ? Laissez-moi deviner : vous vous saisissez de votre meilleur râteau, vous faites des gros tas bien égaux, vous allez chercher un grand sac poubelle d'au moins 150 litres dans lequel vous tassez ces vieux confettis décolorés et obsolètes, puis vous abandonnez le tout sur le trottoir, pour que les agents communaux les emmènent hors de votre vue. J'ai bon ?

Eh ben c'est pas bien ! Allez hop, au coin !
Nous, les français, sommes les champions du monde du sac poubelle : nous passons tout notre temps libre à couper et à jeter ce que la Nature met tant d'énergie à faire pousser. Et dès que brindilles et rameaux touchent le sol à nos pieds, ils se transforment immédiatement en quelque chose de peu ragoûtant qu'il faut vite évacuer : on appelle cela des déchets verts (vous avez vu, je n'invente rien) !

Pourtant, s'il y a bien une phrase à retenir de tous les articles de ce blog, c'est que Dame Nature fait très bien les choses, et qu'il n'est nul besoin de jeter ou de brûler ce qu'elle produit. Elle s'occupe de tout elle-même ! En effet, c'est Dame Nature qui est à l'origine de la maxime "rien ne se crée, rien ne se perd, tout se transforme". Et en ce qui concerne les déchets verts, vous allez voir comme elle est super forte !

Si nous rétrécissions pour atteindre la taille d'une fourmi et que nous allions nous balader dans un jardin ou sous une haie, nous rencontrerions tout un tas de petites bestioles que l'on appelle les "détritivores" (bon, on les voit aussi si on se baisse au raz du sol et que l'on regarde attentivement, mais c'est moins poétique dit comme ça). Ces détritivores, vous en connaissez certains : vers de terre (lombrics, pour faire plus chic), cloportes, collemboles (non, pas Collargol !), acariens, mille-pattes, coléoptères... Toutes ces petites bêtes sont les agents d'entretien de la nature. Ils grignotent débris végétaux et animaux et les transforment en tout petits morceaux qui seront ensuite décomposés par les bactéries. Après leur passage le long de tous ces tubes digestifs, il ne restera de ces déchets qu'un tas de terreau de la plus belle qualité. Vous voyez où je veux en venir ?

Point de déchets verts dans nos jardins, non ! D'aucuns ont d'ailleurs parfaitement compris le truc et parlent même désormais d'or vert ! Vous vous fatiguiez à jeter chaque année les feuilles mortes qui recouvraient votre pelouse en automne ? Que diriez-vous de les stocker au pied de votre haie ? Vous feriez ainsi d'une pierre quatre coups, oui messieurs-dames ! (1) Vous offririez le gîte et le couvert pour l'armée des mini agents d'entretien de votre terrain tout au long de l'hiver, (2) vous offririez à votre haie un engrais 100 % naturel, (3) vous protégeriez les pieds de vos arbustes en cas de grand froid, et (4) vous feriez un geste pour la planète en économisant la dépense de carburant jusqu'à la déchetterie.

Et alors, ce qui est chouette, c'est que tout ceci fonctionne pour les feuilles, mais aussi les résidus de tonte et de taille, pour peu que l'on s'entoure de quelques précautions.
- pour les résidus de tonte : laissez sécher sur place l'herbe coupée en la retournant de temps pendant deux ou trois jours ;
- pour les résidus de taille : broyez les petites branches à l'aide de votre tondeuse à gazon.
Et ensuite, hop ! au pied de votre haie, de vos arbustes, et de vos massifs fleuris ! Miam ! C'est les détritivores qui vont être contents !

Allez, ne me dites pas que vous n'avez jamais entendu parler de ces techniques. Au moins, vous en connaissez le nom, non ? Si, si, rappelez vous : on appelle ça le compostage. Mais oui ! Vous connaissez ! Alors arrêtez d'acheter votre terreau en magasin et portez un regard neuf sur ces feuilles multicolores qui tapissent votre terrain !

Qu'est-ce qu'on dit ? Merci Dame Nature !

dimanche 21 novembre 2010

Idées reçues sur le lierre - 2ème partie.

Vous trouvez l'équation étrange? Pour la légende de l'illustration rusée d'Olivier, faut lire la suite !


Travaux pratiques de Tonton Olivier.
Pour les empereurs de la fainéantise, Olivier nous propose même une application exploitant divers avantages du lierre (voir épisode précédent) : feuillage persistant, bouturage, biodiversité associée. On pourrait ainsi énoncer la légende de son équation/illustration ci-dessus lumineusement pédagogique :

" Moche thuya tout malade voire même mort"
(remercions au passage l'avisé Bupreste,
coléoptère de son état,
pour sa judicieuse attaque)
+
"Boutures de lierre à 2 francs 25 la tonne"
=
"Totem de biodiversité à peu de frais pour fainéants notoires"


Idées reçues.
Le lierre n'est pas une plante parasite!
Non, non et re-non : elle ne suce pas, ne pique pas, ne vole pas, ne détourne pas la sève, ne serre pas, n'étouffe pas les branches et troncs ! Ceux que l'on nomme à tort suçoirs sont en réalité de simples ventouses.

L'apparition du lierre sur un tronc est même plutôt utile au forestier de par son rôle d'avertisseur. On peut la considérer comme un symptôme de faiblesse de l'arbre. Mais pas une cause de ses difficultés.
En effet, un arbre en bonne santé sait se défendre tout seul contre les parasites (arthropodes, bactéries, champignons, etc.) ou les plantes concurrentes en fabriquant et diffusant un arsenal de substances chimiques toxiques dans son écorce, son bois ou dans son environnement proche. Les raisons pouvant affaiblir les arbres sont nombreuses : sécheresse ou humidité excessive, tassement ou chamboulement du sol, tailles drastiques, pollutions diverses, etc.
Bref, lorsque l'arbre est faible ou malade, l'opacité et la vigueur de son feuillage déclinent. C'est lorsque l'accès à la lumière est facilité et que la concurrence chimique est réduite que le lierre peut croître plus vigoureusement sur les troncs et branches. Sa croissance est donc une conséquence de la faiblesse de son support mais n'en est pas la cause.

Au pire, il peut avoir pour effet d'accélérer la mort d'un arbre déjà bien dépouillé de ses feuilles en faisant un peu d'ombre aux dernières branches peu fournies. Mais le sort en était jeté à relativement court terme.

A suivre...

PS: toute notre reconnaissance émue et respectueuse à ceux qui donneront, dans les commentaires, le nom du piaf chantant dans la belle aquarelle d'Olivier.

Idées reçues sur le lierre - 1ère partie.

Le lierre (Hedera helix L.).
Voici bien l'une des plantes les plus malfamées !

Avec un pareil titre et sur un pareil blog, vous devez me voir arriver à des kilomètres avec mes gros sabots de plomb. Ben oui, j'arrive. Plutôt trois fois qu'une et même au pas de charge, lance à la main, la besace pleine d'arguments minutieusement affûtés et collectés, prêt à pourfendre le cliché avec autant d'ardeur que les fromages pasteurisés (et c'est peu dire que j'adore le lait cru).
Bref, il est temps de défendre l'infortuné végétal :

Intérêts du lierre.
1 - Ses fleurs sont extrêmement riches en nectar en fin d'été et début d'automne lorsque la pénurie de ce liquide est notable.
Si vous n'avez jamais vu la cohue invraisemblable de la foule des abeilles et autres butineurs sur ses fleurs, sachez que c'est un spectacle très impressionnant.
Qui se plaindra d'une plante si favorable à ces insectes sociaux ? Qui est prêt à clamer qu'il ne souhaite pas aider les abeilles m'enverra une déclaration sur l'honneur mentionnant qu'il refuse désormais de manger du miel ou tout autre produit en contenant !

2 - Ses fruits sont consommés par les oiseaux en hiver.
Les ennemis des oiseaux frigorifiés et affamés en hiver peuvent directement copier 100 fois : "j'avais bien conscience que la mortalité des passereaux était comprise entre 50 et 75 % durant l'hiver mais j'ai persisté à les priver davantage d'une nourriture saine et sans pesticides (comme c'est souvent le cas des graines achetées dans le commerce) parce que cela me procurait un grand plaisir. J'ai honte. Suis un vilain. Le ferai plus. Promis."

3 - Le feuillage du lierre forme un manchon de protection hébergeant un écosystème complexe, biologiquement très riche.
Toute l'année, insectes, araignées, mammifères, oiseaux, y trouvent refuge ou s'y chassent les uns les autres. Le lierre gardant ses feuilles en hiver, il protège d'autant mieux tout ce petit monde.
Pour enfoncer le clou, l'ONF classe même les sujets à lierre dans la catégorie des "arbres à haute valeur biologique". Et accrochez-vous bien à vos fauteuils : il est désormais obligatoire de maintenir à l'hectare un nombre minimum de ces arbres dans les forêts publiques. L'objectif étant de protéger la biodiversité. Allez-vous toujours sectionner le lierre au bas du tronc? Si oui, allez hop! Trois fois le tour du pâté de maison à cloche pied en marchant sur les mains.

4 - Ce manchon constitue un site de nidification idéal au printemps et/ou de protection contre le froid en hiver pour les oiseaux et même les chaleurs excessives en été.
Un grand nombre d'espèces doit commencer à construire le nid alors que les feuilles des arbres ne sont pas encore sorties. C'est pourquoi elles privilégient souvent les arbres couverts de lierre. C'est particulièrement vrai pour certains rapaces : l'aigle botté par exemple, peu fréquent et donc à soutenir.
Je sais, je sais, certains aiment l'idée de les voir patienter par -15°C sur les fils électriques avec un vent à décorner les bœufs. Mais bon, là, je ne peux plus rien pour eux, c'est sans espoir !

5 - Ses feuilles persistantes permettent au lierre de créer un masque visuel même en hiver dans une haie.
Il s'agit d'une opportunité avantageuse pour remplacer les thuyas qui abritent autant d'animaux que des arbustes en plastique, acidifient le sol et y stérilisent la vie. Le lierre s'avère robuste et sans exigence particulière d'entretien. Voilà comment concilier biodiversité et praticité. Si vous êtes fainéant, cette fois-ci, allez-y, manifestez-vous, cet argument, vous pouvez l'accepter sans honte !

6 - On peut l'utiliser comme plante couvre-sol.
En tant que plante autochtone un peu partout en France (et au-delà), elle est parfaitement adaptée à nos climats et sols. Elle se stabilisera donc aisément pour peu que vous n'apparteniez pas à cette catégorie de maniaques du rotofil qui ratiboisent l'herbe jusqu'à entamer les premières couches de terre. En relevant un peu la hauteur de coupe, non seulement vous épargnerez votre matériel mais en plus, le lierre vous aidera à lutter contre l'érosion, en particulier sur un talus. Si c'est pas merveilleux...

7 - Et enfin, cerise sur le gâteau, argument massue herculéenne, summum himalayen, le lierre est une plante que l'on peut bouturer aisément !!
Partagez-vous mon enthousiasme ? Non ? Hum ! Je ressens les ondes brouillées de cerveaux plongés dans quelque abîme de perplexité...
En gros, cela signifie que primo : même les pires jardiniers de balcon ont toutes leurs chances de le faire repousser (la preuve, j'y suis arrivé !) en pot ou en pleine terre. Secundo : la ressource est gratuite et ultra commune. Et je vous promets que personne ne vous dénoncera si vous prélevez seulement quelques-uns des plus jeunes rameaux !

A suivre...



dimanche 14 novembre 2010

Pourquoi protéger la biodiversité ?




Voilà une question que l'on entend souvent, particulièrement cette année, puisque 2010 a été proclamée Année internationale de la biodiversité.
C'est vrai qu'aujourd'hui, tout le monde ou presque est convaincu qu'elle est menacée et qu'il est nécessaire de la protéger. Mais pourquoi, en fait ? A quoi elle sert, la biodiversité ?

Eh bien chers lecteurs, sachez qu'une ribambelle de savants se sont posés cette même question. Et chose improbable, pour une fois, les chercheurs ont trouvé ! En effet, on a découvert que la biodiversité fournit tout un tas de services à la planète en général, et à l'Homme en particulier. Ces services ont été appelés "services écosystémiques", ou "services écologiques". Oui, ce sont des noms un peu compliqués, mais ce n'est pas surprenant, de la part des savants... Alors il faut s'y faire, c'est comme ça...

Plus sérieusement, la notion de services écosystémiques a été popularisée par les études réalisées au cours de l’Evaluation des écosystèmes pour le millénaire (Millenium Ecosystem Assessment), commandée en 2000 par le Secrétaire Général de l'Organisation des Nations Unies (ONU), Kofi Annan. Il s’agit d’un travail qui a réuni pendant quatre ans plus de 1360 experts scientifiques issus de près de 50 pays pour évaluer l’ampleur et les conséquences des activités humaines sur les écosystèmes dont dépendent directement la survie et le bien-être humain.

Alors j'entends déjà mes amis écolos protester : "Non mais ho, dis-donc ! La biodiversité n'est pas là que pour le bien-être humain ! C'est incroyable, cette façon de penser ! D'abord, elle était là bien avant nous ! L'espèce humaine est toute jeunette par rapport aux insectes, aux végétaux... sans parler des bactéries et autres organismes unicellulaires !"
C'est tout à fait vrai. Mais ce qui est intéressant avec cette approche très anthropocentrique (« la biodiversité au service de l’être humain »), c'est qu'elle se révèle un levier particulièrement puissant pour communiquer sur la nécessité de prendre en compte la biodiversité dans les décisions politiques (au sens le plus large) concernant l’aménagement ou la gestion d’un territoire, quelle que soit l'échelle où on se place : du monde entier jusqu’à... la jardinière de son balcon.

Les services écosystémiques ont été regroupés en quatre grandes familles :
- les services de support sont les services qui concourent aux grands processus de fonctionnement des écosystèmes : le cycle de l'eau, de l'azote, de l'oxygène (photosynthèse), la formation des sols, etc.
- les services d'approvisionnement sont impliqués dans la production de nourriture (agriculture, pêcheries), de fibres (tissus), de bois (chauffage, papier, mobilier), d'énergie (pétrole), etc.
- les services de régulation assurent le contrôle des maladies, des épidémies, des inondations, ou encore la purification de notre eau et la pollinisation de nos plantes et de nos légumes.
- Enfin, les services culturels sont ceux qui nous permettent de nous promener à pieds, en vélo ou à cheval, de pêcher ou de chasser, d'escalader les sommets ou d'explorer les fonds marins, d'observer la nature, etc. Ce sont ces services culturels qui nous offrent les douces sensations que nous ressentons devant dans une belle forêt, devant une chatoyante prairie fleurie ou près d'un facétieux torrent de montagne.
Par ailleurs, c'est sur ces services culturels que s'appuient en grande partie les articles de ce blog...

Ci-contre, une abeille en train d'effectuer son laborieux mais délicat travail de pollinisation (vous reconnaitrez aisément la patte de Guillaume pour le dessin).
Dans certaines provinces de l'Himalaya, les pollinisateurs sauvages ont fortement décliné en raison d'une utilisation massive de pesticides. Résultat : la pollinisation des pommiers est réalisée à la main, par hommes, femmes et enfants (source : biodiversité 2010)...

On ne s'en rend pas bien compte lorsque l'on fait ses courses au supermarché, mais sur les quelques 100 espèces culturales (fruits ou légumes) qui assurent 90 % des apports alimentaires de 146 pays, 71 sont pollinisées par les abeilles (essentiellement les abeilles sauvages), et plusieurs autres par les thrips, guêpes, mouches, coléoptères, phalènes et autres insectes (source, FAO). Honnêtement, vous vous rendiez compte de l'importance de ces petites bestioles toutes rikiki pour la pérennité de notre grande espèce humaine ?

Vous ne saviez pas trop pourquoi il faut protéger la biodiversité ? Maintenant, vous savez...

mercredi 3 novembre 2010

Des herbes hautes ? C'est du propre !

"Laisser pousser l'herbe dans mon jardin, dans les espaces verts publics ou sur les bords de route ? Quelle drôle d'idée ! Mais pour quoi faire ?
Bon, c'est vrai que c'est joli au cinéma ou à la télé. D'ailleurs, j'aime beaucoup les paysages des films qui parlent de grands espaces sauvages, comme "Danse avec les loups" ou "l'Homme qui murmurait à l'oreille des chevaux", mais je ne sais pas trop pourquoi, près de chez moi (ou pire, chez moi), c'est pas pareil... Les herbes hautes, je trouve que ça fait sale..."

Voilà un discours que l'on entend fréquemment lorsque l'on aborde le sujet épineux de la Nature en ville et de la fauche tardive en particulier. Je me suis souvent posé la question : pourquoi cette méfiance vis à vis des hautes herbes ? Comme mon camarade Guillaume, je suis convaincu qu'il y a là-dessous quelque chose de hautement culturel (voir son billet du 26 mai 2010), quelque chose qui remonte à fort longtemps, peut-être même à la nuit des temps.

En effet, il faut se rappeler que notre précieuse Espèce humaine n'a pas toujours eu cette place de choix en haut de la chaine alimentaire : oui, mesdames et messieurs, nous autres, humains, avons un jour été les proies de terrifiantes créatures telles que Lions, Panthères, ou encore Tigres à dent de sabre (voir la photo ci-dessous, retrouvée dans les fouilles archéologiques d'un campement préhistorique ; cliquez pour agrandir).

Ces épouvantables prédateurs n'hésitaient pas, on l'imagine, à se tapir dans les hautes herbes de la savane africaine (d'où nos ancêtres sont originaires) pour nous sauter dessus sans le moindre avertissement ! Et que dire de ces serpents venimeux, de ces scorpions, de ces araignées qui devaient également profiter de cette cachette providentielle pour mordre ou piquer le pauvre quidam imprudent ? Pas besoin de beaucoup de créativité pour se douter qu'à cette sombre époque, une balade dans les hautes herbes devait quelquefois se terminer au fin fond d'un estomac antipathique et étouffant. Sans compter ces plantes qui piquent, ces herbes qui coupent, qui brûlent, ou qui font tousser (ne les qualifie-t-on pas de "mauvaises herbes" comme si elles n'avaient qu'une envie : nous faire du mal ?)
Bref : nous avons donc appris, pendant des milliers d'années, à nous méfier des herbes hautes...

Alors quelle euphorie lorsque sont apparus faux, cisailles, sécateurs, tondeuses, coupe-bordure et autres engins de torture. Enfin il nous devenait possible de dompter cette hostile nature que nous redoutions tant ! Enfin nous pouvions la façonner selon notre bon vouloir, lui donner les formes que nous voulions, des formes rassurantes, des ronds, des carrés, et puis surtout : nous pouvions, ô joie ! ratiboiser l'herbe de manière à nous assurer qu'elle ne puisse pas dissimuler quelque maléfique prédateur ! Et c'est ainsi que sont apparus nos fameux jardins à la française, avec une Nature bien domptée, bien docile, bien géométrique, en un mot : bien propre, avec la raie au milieu, et pas un brin d'herbe qui dépasse.

Voilà donc, pour moi, la raison de notre amour pour ces gazons bien tenus, bien homogènes et bien rassurants. Bien sûr, nous continuons d'être attirés par ces grandes étendues sauvages que nous apprécions sur nos écrans, ou en vacances à la campagne. Sans doute parce qu'elles nous rappellent les moments où nous étions une espèce encore libre et sans contraintes. Mais nous avons néanmoins plus de mal à accepter cette sauvagerie trop près de chez nous... Peut-être avons-nous encore en nous, caché dans un de nos gènes, le lointain souvenir d'une gueule béante jaillissant d'une touffe d'herbes hautes.

Olivier


Complément de Guillaume: "De nos jours, les circonstances dans lesquelles nous éprouvons le contact avec la nature ont radicalement changé : la technologie (équipement, vêtements et protections corporelles), la médecine, le découpage de l'espace naturel, GPS (etc.) nous protègent dans presque toutes les configurations. Il faut donc profondément relativiser le danger représenté par la nature de nos jours. Même dans des régions tropicales plus risquées, les chercheurs n'hésitent plus à prospecter. Seules les personnes socialement défavorisées de ces contrées ou bien celles aux comportements notoirement imprudents des régions tempérées courent un risque. Or, notre volonté de contrôle sur la nature a atteint de tels extrêmes qu'elle n'a désormais quasiment plus aucun sens. Voire risque même de nous compliquer la vie à force de vouloir la détruire autour de nous. Et dans ces nouvelles conditions, ce n'est pas le retour des hautes herbes ici ou là qui ramènera cette menace. Alors, détendons-nous un peu et savourons en toute tranquillité les richesses qu'elles nous réservent."

lundi 1 novembre 2010

Fantaisies anatomiques - 2

Nouveau quiz foutraque pour les amoureux de la fantaisie littéraire et des bestiaires approximatifs. Proposez dans les commentaires des noms farfelus avec juste ce qu'il faut d'un semblant de logique pseudo-scientifique pour les créatures ci-après!
1 point par proposition rigolote et 1 point bonus pour la qualité, le style et l'imagination. Nous tenons les comptes et établissons un palmarès.
Et pensez aussi à consulter les autres planches sur d'hypothétiques amphibiens : Fantaisies anatomiques - 1.
Fantaisies anatomiques - 3.
Ou si vous n'êtes pas inspirés


vendredi 29 octobre 2010

Auprès de ma Berce, qu'il fait bon, fait bon, fait bon... 4ème



Sur mes chères berces, je n'ai pas photographié (ou parfois mal) tout ce que j'ai pu voir. La sélection des fantastiques créatures ne sera jamais exhaustive mais peu importe après tout.

Voici pour l'instant un représentant d'une famille de guêpe, les Sphecidae, qui ont des mœurs pour le moins radicales ! Les adultes capturent des insectes (souvent des orthoptères et des chenilles de papillons) mais aussi des araignées qu'ils paralysent. Les infortunées proies sont ensuite introduites dans un nid dont les formes sont des plus diverses : terrier creusé dans un sol de sable ou de terre battue, nid confectionné à l'aide de brindilles, petites urnes de terre mélangée à de la salive, etc. Des œufs sont pondus dans les proies ; les larves qui en sortent les dévoreront encore vivantes à l'abri, dans le refuge conçu par leurs parents. Ces derniers se nourrissent quant à eux souvent sur les fleurs en y sirotant le nectar.
La bestiole du jour se nomme plus précisément Isodontia mexicana.
Sa spécialité semble être les orthoptères et son nid est constitué de brindilles agencées dans des failles et anfractuosités allongées. Cette espèce exotique provient d'Amérique et se propage petit à petit dans toute la France. Elle se distingue par sa livrée entièrement noire alors que la plupart de ses cousines autochtones allient le rouge et le noir. Sa taille est assez remarquable puisqu'elle doit bien approcher les 3 cm de long.
Elle s'adapte visiblement à de nombreux milieux et on peut la rencontrer dans les jardins. On ne sait pas si elle posera les graves problèmes de certaines autres espèces envahissantes (souvent qualifiées d'invasives) animales ou végétales. De toutes façons, il est probablement trop tard pour entreprendre quoi que ce soit contre elle et il faut bien avouer que la voir promener son impressionnante carcasse sur les ombellifères est un spectacle fascinant.


PS: Je continue à vous recommander très chaudement le numéro 84 de la célèbre revue naturaliste La Hulotte, intitulé "Frissons d'ombelles" qui m'a donné envie d'observer la faune des berces.



jeudi 21 octobre 2010

Fantaisies anatomiques - 1

Détendons nous un peu à l'aide du jeu suivant.
Observez attentivement les dessins ci-dessous et sans utiliser un guide de terrain sur les amphibiens, donnez les noms de ces quelques espèces de la région Poitou-Charentes...
1 point par bonne réponse. Une certaine tolérance s'appliquera quant à la formulation des noms vernaculaires...
A voir aussi : Fantaisies anatomiques - 2.

lundi 18 octobre 2010

Auprès de ma Berce, qu'il fait bon, fait bon, fait bon... 3ème partie.

ACTE I, SCENE I:

Le rédacteur sentencieux : « La vie sur les Berces n'est pas un long fleuve tranquille et la mort se tapit souvent en embuscade parmi leurs blanches fleurs à la pureté cruellement trompeuse. Loin de chercher les sombres recoins, les voiles d’ombres portées déroutantes, elle frappe au grand jour, par une implacable attaque puissamment illuminée, n’épargnant aucun détail. Son nom : Thomise ! »

Le lecteur s’esclaffant : « Hein ? Quoi ? Denise ? Mais quel nom ridicule ! La mort s’appelle Denise ! Je suffoque de rire ! ».

Le rédacteur consterné : « Mais non ! Thomise ! Avec un T, un H, un O et un M ! C’est beaucoup plus effrayant ! C’est une araignée crabe qui capture des proies parfois beaucoup grosses qu’elle : guêpes, abeilles, coléoptères, tout y passe ! Son efficacité est surprenante ! Mais bon, là, l’effet est retombé comme un soufflet ! Magnifique ! Merci ! Espérons au moins que les gens auront moins peur de ces pauvres araignées si utiles pour réguler les populations d’arthropodes.»

Le lecteur perplexe : « Mouais, bof…De toutes les façons, les araignées ne sont pas réputées pour être des reines de beauté, difficile de les apprécier malgré les services rendus ».

Le rédacteur remonté : « Que nenni ! Certaines de ces araignées sont souvent camouflées en ayant la même couleur que la fleur sur laquelle elles attendent. On en trouve ainsi des jaunes citrons, des vertes, des pas mûres, des blanches, des brunes, des blondes et même des roses. La mort en rose, cela ne vous sied-il toujours pas? »

Le lecteur songeur : « Mmmh, alors, va pour la mort en rose… »

Le rédacteur revigoré : « Bien ! Bien ! Permettez moi-donc de vous la présenter. Il me faut pour cela procéder à quelque licence. M'autorisez-vous? »

Le lecteur lassé des manières : « Certes, oui. Mais allez au fait ! »

Le rédacteur obséquieux : « Je dois pour cela faire un écart à la procédure. La créature qui nous intéresse n'est point postée sur une Berce. Mais sur un chardon ! »

Le lecteur enragé: « AH! Non, parbleu ! D'abord d'horribles araignées en costumes roses puis d'infâmes chardons ! Non mais qui voulez-vous intéresser ? Avez-vous perdu la raison ? »

Le rédacteur tourmenté : « Mais bon sang ! De quelle infamie parlez-vous? L'araignée tire sa beauté de celle de la plante, en quelque sorte. Regardez-y mieux avant de juger. Et la bête et la fleur. »




Le lecteur désarçonné : « Oh ! La belle ! Oh! Quelle élégance ! Je n'en crois pas mes yeux... »

Le rédacteur apaisé : « En effet. Mais ne vous y trompez pas. Toute guêpe de passage sera promptement paralysée et digérée. Quant à sa couleur, nulle guêpe n'a témoigné : on ne sait si elle rend la mort plus douce. »


Auprès de ma Berce, qu'il fait bon, fait bon, fait bon... 2ème

Voici présentées dans un joyeux désordre, quelques-unes de ces fameuses petites merveilles miniatures visibles sur les berces.


Gasteruption jaculator. Quel nom, mes amis !! Les larves sont des parasites de certaines abeilles solitaires et les adultes se nourrissent de nectar.

Cette gracile cousine des guêpes ne dépasse guère 15 mm.











Magritte aurait pu dire: "Ceci n'est pas une guêpe!". Ben oui, pardi ! C'est une mouche ! Enfin, l'image d'une mouche pour ne pas froisser le fameux peintre. Une image qui se prendrait pour une guêpe...

Nom: Stratiomys potamida en latin. Stratiomys potamida en français vernaculaire. Et Stratiomys potamida pour les intimes.




Voici maintenant Oedemera nobilis dont les mâles présentent la caractéristique d'avoir d'épais cuissoux, à peine insuffisants pour réaliser de décents confits. Ce petit coléoptère est très commun sur toutes sortes de fleurs. Retenir son nom vous offrira à coup sûr moult occasions de briller en société pour des efforts réduits au strict minimum. C'est un peu fourbe, certes... Mais rien ne vous empêche de le retenir pour le plaisir du partage de la découverte avec vos amis. Et nommer les êtres vivants, c'est aussi une façon de leur reconnaître une existence, une réalité. Or, il est difficile de protéger ce qu'on ne connaît pas encore. Révéler cet animal aux yeux du monde, c'est déjà faciliter sa préservation et celle des fleurs qu'il visite. A bon entendeur...



Auprès de ma Berce, qu'il fait bon, fait bon, fait bon... 1ère partie.

Ah ! La Berce. Ma chère Berce...


Plutôt qu'une simple plante à fleurs, il s'agit d'un bouillonnant complexe de pistes d'atterrissage. Un véritable aéroport à insectes et son lot d'encombrement, de frénésie, sa multitude en transit. Il n'est pas rare d'observer sur un seul de ses pieds, plus d'une dizaine d'espèces d'arthropodes (dont quelques araignées crabes) en même temps.

La diversité des bestioles y est si foisonnante que la célèbre revue "La Hulotte" a consacré un numéro spécial à cette impératrice de la biodiversité et à ses sbires arthropodes. Je vous recommande d'ailleurs très chaudement ce numéro 84, intitulé "Frissons d'ombelles".


Personnellement, au risque de passer pour un vrai taré, je confesse attendre avec impatience la floraison de la plante (qui se fait attendre : fin juin à juillet selon les saisons) pour observer cette foule de bestioles merveilleusement étranges, bizarres ou simplement magnifiques.


Comestible, alimentaire, refuge pour les insectes hivernants (par exemple, des coccinelles dans sa tige creuse), elle a aussi de quoi séduire les humains qui feraient bien d'en épargner quelques pieds dans leurs jardins si le destin a bien voulu leur offrir les conditions de sa croissance (sol riche et plutôt frais).

Les graines ci-contre de la plante se récoltent aisément et peuvent être resemées dans un sol plutôt riche
et frais.

Néanmoins et pour être parfaitement honnête, il faut préciser que la plante fraîche peut occasionner des brûlures par photosensibilisation : les parties de peau nues s’étant frottées (pas juste effleurées occasionnellement comme l’ortie) à la belle puis exposées au soleil se transforment en plaques plus (parfois sévèrement) ou moins (certains chanceux sont insensibles) douloureuses. Porter un pantalon et des manches longues suffit à s’en protéger. Quand vient le temps de la couper, si vous pratiquez le fauchage tardif en particulier, la plante sèche n’est plus guère virulente.


Dernière précision, sa cousine la Berce géante du Caucase (Heracleum mantegazzianum) est une plante considérée comme invasive (envahissante en provenance du Caucase, donc). Elle tente actuellement de reconquérir le territoire qu’elle occupait avant les glaciations. Ses blessures sont beaucoup plus dangereuses et redoutées. Elle fait souvent l’objet d’éradications.


La Berce commune (Heracleum sphondylium) est une plante bisannuelle de la famille des ombellifères, désormais appelées apiacées. Il ne sera question que de la Berce commune dans ce blog sauf précision explicite.

De futurs articles détailleront la diversité des observations possibles sur cette plante fabuleuse.


jeudi 24 juin 2010

"Fast food des friches" - bioquantité ou biodiversité

Selon les sources de l'INAO (Institut national de l'origine et de la qualité), il existe en France 49 appellations d'origine contrôlée de produits laitiers, 395 de produits viticoles et encore 41 de divers autres produits alimentaires. Et dans de nombreux pays, des armadas de labels ne protègent pourtant qu'une partie de la formidable diversité des produits des terroirs. Une richesse inouïe dont on ne verrait que la partie émergée de l'iceberg.
Pourtant, la malbouffe semblait imposer irrémédiablement jusqu'à présent une palette réduite de saveurs où la puissance et le manque de subtilité dominaient : gras, sucré, croquant, fondant. Et basta. Une industrie agroalimentaire surpuissante avait imposé sa cuisine simpliste hyper-calorique pour assouvir les seuls besoins primaires d'humains en manque d'exigence ou malheureusement privés d'une éducation gustative suffisante.
La quantité primant sur la qualité, la diversité.

Les humains non contents de s'imposer cet appauvrissement à eux-mêmes se sont mis en tête de l'imposer aussi aux butineurs. Alors que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes pour les abeilles et papillons, la nature pourvoyant tout ce qu'il fallait de feuilles à grignoter pour les larves, de fleurs à butiner pour les adultes, avec taille, forme et profondeur des corolles adaptées à toutes les trompes, eh bien, il a fallu que l'homme s'en mêle. On a vu apparaître des plantes (à acheter, évidemment) spécialement mellifères. Vous imaginez, des fois que certains aient l'idée d'utiliser gratuitement les ressources de la nature, en l'occurrence, les fleurs et arbustes sauvages du coin qui jouent le même rôle depuis la nuit des temps avec succès? Surtout ne pas laisser le temps aux gens de réaliser que tout ne se trouve pas au supermarché! Vite ! Exploiter le filon marketing avant qu'ils aient le temps de réfléchir !
Ainsi donc, des plantes exotiques telles que le fameux arbre à papillons (ou Buddleia) ont envahi nos jardins, puis nos terrains vagues (îlots de biodiversité miraculeusement oubliés par les lames), puis les espaces naturels et autres réserves de biodiversité.
Cet arbuste, c'est le "fastfood des friches" : il produit beaucoup mais d'une seule substance sucrée, le nectar. Il attire beaucoup de papillons, notamment, c'est à dire des insectes adultes. Le problème c'est qu'il ne nourrit aucune larve lorsqu'il croît dans nos contrées. Il ne permet à aucune chenille de se transformer en papillon. Il ne crée pas de la biodiversité mais permet seulement de nourrir celle qui s'est développée sur d'autres arbustes, indigènes eux. En outre, il a tendance, en se propageant rapidement, à remplacer la flore locale nourricière, celle qui, justement, crée et démultiplie la diversité animale.
Quelques papillons communs qui se nourrissent sur des plantes ressources à l'abondance plutôt irréductible (orties, ronces, certaines violettes, des crucifères plus ou moins cultivées comme les moutardes et les choux, etc. Loin de moi la volonté de jeter l'anathème sur ces plantes fort utiles et respectables.) peuvent alors se concentrer en masse autour du fastfood des friches pour s'y gaver allègrement de ses larges décilitres de nectar. Mais il s'agit d'un nombre restreint d'espèces : Citron, piérides blanches, Paon du jour, Vulcain, Robert le Diable, Belle Dame... On parle alors plutôt de "bioquantité" (beaucoup d'individus de la même espèce) que de biodiversité.
Certes, il ne sera jamais possible de tous les rencontrer dans un jardin mais il existe un peu plus de 250 papillons de jour en France. Et ceux de nuit se comptent en milliers. Cela laisse rêveur.

Planter un Buddleia part souvent d'un bon sentiment. Celui d'apporter un soin à ces pauvres papillons que l'on a bien fait souffrir. Un peu comme les graines pour les oiseaux. Vous l'avez compris, ce n'est pas aussi évident...
Je peux vous imaginer un peu contrarié par ces propos qui ressemblent à ceux d'un rabat-joie. Détrompez vous ! Je ne veux pas vous laisser désemparés par l'absence de solutions. Car justement, elles existent ! Elles sont mêmes les moins fastidieuses à appliquer, les moins chères.
On peut rêver d'un monde où les animaux n'auraient pas besoin de soins artificiels, ces béquilles que nous croyons toujours indispensables à leur survie.
Il suffit de choisir pour nos jardins des plantes issues de la flore locale. Au moins un ou deux milliers d'arbres, arbustes et fleurs différents croissent dans chaque région. Parfaitement adaptés à nos sols et climats, ils n'ont pas besoin de soins particuliers, d'eau, d'engrais et encore moins de produits chimiques. Certains arbres et arbustes se bouturent le plus simplement du monde. Il suffit souvent d'aller récolter, certes avec parcimonie, quelques jeunes rameaux dans les alentours, de cornouiller, de rosiers, d'osiers sauvages, etc. Sinon, on trouve les jeunes plants aux prix les plus modiques chez certains pépiniéristes sous des termes tels que "plants forestiers". S'il est difficile de donner une liste valable pour chaque région de France, on peut se renseigner auprès de diverses associations naturalistes ou nature. Je réponds volontiers aux questions sur ce sujet si vous le souhaitez via les commentaires.

Laisser la nature se reconstituer par elle-même est encore ce qu'il y a de plus facile. Pratiquez le fauchage tardif (une seule coupe annuelle en automne) sur certaines parties du jardin, par exemple, et les insectes vous remercieront. Notamment par le rôle qu'ils joueront en tant qu'auxiliaires du jardinier...

Toute sortie nature sur les papillons et autres butineurs se doit de parler des plantes sauvages nourricières des larves ou des mellifères dont ces animaux dépendent. La quantité de ces végétaux est tellement faramineuse qu'on a du mal à imaginer de devoir ensuite acheter une plante exotique réputée pour son nectar. Sans oublier qu'autant de ces espèces s'avèrent alimentaires, médicinales, tinctoriales, textiles, etc.
C'est trop évident et simple peut-être, pour sembler plausible.

Maintenant, vous savez.

lundi 31 mai 2010

J'ai fait un rêve.























Le monde des rêves se caractérise souvent par l'invraisemblance des faits qui s'y produisent.
Utopie et réalité s'y confondent parfois.

Justement, il y a de cela quelques nuits, j'ai commis deux rêves particulièrement irréalistes.
Pour le premier, j'ai rêvé qu'un décret ministériel interdisait toute coupe, toute destruction de coquelicots, de marguerites, de résédas, de campanules, de chardons, de lotiers, de sainfoins, de panais et de berce, de cardère et de bardane, de trèfles et de toute une ribambelle d'autres plantes sauvages du 1er mars au 30 septembre. Quelques exceptions justifiées permettaient de faciliter l'application de cette mesure juridique : pour des raisons de sécurité, tontes sur 1m50 de bordures routières mais pas plus, de terrains de sport, de lieux de stationnement et des parties centrales de chemins, etc.
Summum de l'utopie, il devenait obligatoire, par arrêtés préfectoraux, sur tous types d'espaces enherbés de planter un minimum de 75% d'espèces sauvages locales pour chaque nouvelle plantation. Les listes étant définies selon des aires de répartition des espèces à l'échelle régionale.

Au bout de deux années d'application de ces règles juridiques et malgré une fréquente indiscipline tolérée par les institutions, une augmentation inexpliquée des rendements agricoles des producteurs de fruits se produisit. Une surprenante diminution des maladies associée à une hausse spectaculaire de la pollinisation avaient même rendu inutile l'utilisation de produits chimiques. Les scientifiques et naturalistes finirent par publier des chiffres prouvant une hausse brutale des effectifs de butineurs : abeilles, bourdons, papillons, guêpes, syrphes et autres insectes.
Dans leurs jardins, les gens avaient, eux aussi, fini par constater une évidente apparition de nombreuses espèces de papillons. Ils les croyaient nouvelles puisqu'ils ne les avaient jamais vues auparavant mais il s'agissait plutôt d'un retour d'espèces passées dans l'anonymat à force de dégradation de leurs milieux de vie.

Au plus profond du sommeil, j'ai fait un autre rêve tout aussi incroyable.
Je visitais au début du mois de juin les abords d'un local des services techniques des espaces verts d'une commune. Aucune tonte n'avait été effectuée sur toutes les parties enherbées : il s'agissait visiblement d'une gestion en fauchage tardif ! Fait absolument impensable en ces lieux où l'on s'attend plutôt à un excès de zèle des machines à tondre et des diffuseurs de produits chimiques biocides.


J'y trouvais là aussi des plantes sauvages parmi lesquelles : des résédas jaunes, des coquelicots, des marguerites, divers géraniums, graminées et chardons sauvages, des compagnons blancs, etc.
Aussitôt, j'organisais une séance de découverte en rassemblant des habitants de la commune et des environs pour partager avec eux ce festival de biodiversité bariolée. Un enthousiasme roboratif emplissait le cœur des personnes présentes qui repartaient avec la volonté de rééditer l'opération chez elles...

Eh bien croyez moi si vous le voulez mais le plus surprenant, c'est que l'un de ces rêves s'est réalisé. Et si. A vous de deviner lequel...

Guillaume.

jeudi 27 mai 2010

Voici le mois de Mai


Houla ! Déjà le mois de Mai ! L'herbe est déjà haute : il est grand temps de ne pas tondre le jardin !
 Oui-oui, ne pas tondre... Enfin, pas partout : si on laissait un petit espace de liberté à Dame Nature ? Un petit endroit où on regarderait pousser les fleurs, butiner les insectes ? Ce petit endroit pourrait-être le fond du jardin, là-bas, puisque personne n'y va jamais ?
Ça ne coûte rien (on économise même de l'énergie pour sa tondeuse et de l'huile de coude !), mais ça apporte beaucoup... Ce faisant, on laisse à la végétation le temps d'accomplir le cycle de la vie : production des fleurs, qui deviennent des fruits, qui abritent des graines, qui sont dispersées par le vent, l'eau ou les animaux, et qui deviennent des plantes. En même temps, ce cycle permet à tout un tas d'animaux de manger, de s'abriter, de batifoler... Ce serait dommage de rater tout ça, n'est-ce pas ?
Bien sûr, il n'est pas question de laisser le fond du jardin s'enfricher, hein ? Vous pourrez évidemment faucher votre prairie en fin d'été, lorsque le cycle sera bouclé, que les graines seront tombées au sol, et que tous les petits insectes se prépareront à s'abriter pour l'hiver.

mercredi 26 mai 2010

Ici, le cliché, on le prend, on le retourne et... on le broie menu ! Tome 2


D'où vient cette volonté inconsciente, à la limite de la maniaquerie pathologique de contrôler, de dompter à outrance la nature ?
S'il ne s'agissait que de contrôle... Parce que cette propension à la dominer entraîne aussi beaucoup de destruction, d'extermination. Ces ravages ne résultent pas que de la sustentation de nos besoins et désirs plus ou moins futiles et superflus.
Non, il y a aussi cette peur, cette méfiance voire cette haine envers les êtres vivants non humains. Sinon, comment expliquer cet acharnement à l'encontre de certaines formes de vie auxquelles on peine, même avec la plus grande ouverture d'esprit, à attribuer des pensées existentielles d'une profondeur abyssale susceptibles de motiver une haine viscérale de l'homme. Nous prêtons aux insectes, araignées, serpents, requins, amphibiens et autres fléaux du même acabit des desseins malfaisants, une détermination à nous nuire. Et pourquoi pas un plan concerté de génocide, élaboré à force de réunions secrètes, un complot fomenté par une assemblée invisible de plantes et d'animaux intriguant dès que nous avons le dos tourné, tant qu'on y est ? Tiens, pourriez-vous sérieusement me retranscrire les recommandations perfides d'une amibe à une retorse tige de liseron? Les discussions atrabilaires d'un cloporte et d'une limace misanthropes ? Hum! Je veux bien risquer de supputer que vous peinerez un tantinet à noircir la feuille... Ceci dit, rien ne vous empêche de me contredire dans les commentaires !

L'attribution de ces desseins découle pour une bonne part d'une diabolisation de tout ce qui peut être sauvage ou issu de la nature. Les relations entre la Nature et la religion sont pour le moins conflictuelles.
Le christianisme a eu besoin pour installer son propre socle de bouter hors de leurs piédestaux des divinités incarnées en des créatures et végétaux sauvages. Les religions païennes qui les y avaient placées là avaient d'ailleurs pu faire de même avec de précédentes croyances. Le but n'est pas ici de stigmatiser une religion plutôt qu'une autre mais bien de souligner le processus qui a conduit à associer un imaginaire maléfique à certains animaux. Les serpents (la tentation démoniaque du paradis, cela ne vous dit rien? Après tout, Adam n'avait qu'à pas croquer la pomme) et reptiles se sont mués en dragons ; les preux chevaliers ont pu prouver leur courage en les éradiquant. Saint Patrick les aurait chassés d'Irlande, terre où il n'y a pas de serpents de nos jours... On rigole quand les plus gros spécimens de France ne dépassent pas les 2 m de long.
Petites précisions utiles : en France, tous les ans 2 ou 3 personnes, en moyenne (donc pas forcément tous les ans), meurent des suites d'une morsure de serpent. Parmi ces infortunés, certains sont tués par une attaque cardiaque déclenchée par la peur alors même que le serpent incriminé n'était pas venimeux (couleuvre). Mais la majorité des cas concerne des personnes notoirement et grotesquement imprudentes : du genre à se promener en sandales et shorts dans des zones broussailleuses, à titiller les animaux et négliger de se faire soigner même en cas de morsure par une vipère. Celle-ci n'est possiblement mortelle que pour les très jeunes enfants, les personnes âgées ou particulièrement faibles. Pour le reste de la population et à condition de consulter, le risque de trépasser approche celui d'être assommé par une météorite en sortant de son foyer. Je ne souhaite à personne une morsure et celle d'une vipère est tout sauf agréable. Mais concernant la mortalité, en gros, il s'agit d'un non-risque. A comparer au nombre d'incidents mortels provoqués par des chiens non sauvages, "civilisés" car élevés par des hommes. Ou pire, aux milliers de morts et handicapés suite à des accidents de la route. Pour le coup, il y a de de quoi développer une vraie psychose en montant dans son véhicule. Pourtant, ce sont bien les serpents qui l'emportent largement à ce jeu morbide.

Que dire de ces pauvres amphibiens : le crapaud, symbole de déchéance, forme dégradante d'une métamorphose punitive est considéré comme sale et répugnant alors que sa peau exsude un mucus antiseptique qui le nettoie en permanence. Un gel douche auto-produit en quelque sorte! Il lui confère aussi une saveur désagréable mais pas de quoi rendre malade. ll y a bien quelques prédateurs pour s'en contenter. A peine de quoi donner un goût exécrable (et donc crédible) à un remède de sorcière : nous revoilà aux prises avec le pendant démoniaque.

La Chouette Effraie (rien que le nom m'amuse ! Toute une histoire!) ou Dame Blanche : réincarnation spectrale d'une dame toute de blanc vêtue terrorisant les erres nocturnes pour assouvir un obscur besoin de vengeance. Athéna avait pourtant choisi une petite cousine, la chouette chevêche, pour symboliser la sagesse mais bon, les hommes, eux, ont perdu la leur en chemin. Qui va s'occuper des rats et autres rongeurs nocturnes alors? Les villes sont éclairées la nuit stimulant la ponte des pigeons comme pour ces malheureuses poules de batteries. Du coup, pour se protéger de cet afflux de roucoulements et fientes associées, on grillage tous les accès aux parties intérieures des bâtiments publics et religieux. La chouette se trouve privée de ces gîtes à son tour. Pourtant, l'un de ses noms témoigne que ce n'était pas le but recherché : Effraie des Clochers. Ce sobriquet constituerait un sacré contre exemple à la présente démonstration s'il qualifiait la réalité. Et les pigeons et souris, proies potentielles de la chouette, de festoyer toute la nuit. Ah, non, j'oubliais nous avons nos dangereux produits chimiques... C'est quand même plus rassurant: on s'empoisonne mais on sait comment ; on maîtrise le processus. Il vaut mieux en rire. Où est la logique?

Et le sanglier, incarnation de la sauvagerie dans ses connotations les plus négatives alors que cet animal a, selon ses détracteurs les plus retors, gagné en intelligence ce qu'il a perdu en grâce physique. Je connais aussi beaucoup de photographes fascinés par sa beauté, sauvage, justement : ce côté ténébreux et fougueux, ce tempérament plein de vigueur... Faudrait peut-être arrêter de les nourrir, s'il y en a tant que ça! Mais il est vrai qu'ainsi, il devient plus difficile de les louper ! Ça défoule certains...

La liste est longue et il serait fastidieux de la dérouler jusqu'au bout (à vos commentaires !) mais je vous propose encore un exemple : les araignées, tellement haïes qu'elles ont fini par incarner l'horreur visuelle absolue, la peur hystérique. Ceci dit, un extra-terrestre sans idées reçues serait peut-être plus effrayé par nos apparences que celles des arachnides. Après tout, nous apprenons à les trouver moches. Accusées de toutes les piqûres mystérieuses ou inexpliquées, elles sont pourtant quasi incapables, en France et dans une large part de l'Europe de piquer la peau humaine. A part quelques espèces cachées sous les pierres de garrigue du sud de la France qui peuvent éventuellement causer quelques blessures (il faut donc le faire exprès pour aller se faire piquer!), celles que nous côtoyons sont absolument inoffensives. A moins de les plaquer sur les parties les plus tendres de nos épidermes pour les forcer à mordre, il n'y pas moyen. Mais qui pratique une activité aussi fantaisiste? Si vous connaissez ce genre d'hurluberlu, votre témoignage nous intéresse ! Mieux vaut se souvenir de la quantité phénoménale de moustiques, moucherons, mouches et autres pauvres bestioles qu'elles capturent tous les jours réalisant raisonnablement la mission de régulation avec infiniment plus de propreté que nous et nos insecticides polluants. En d'autres régions du monde où les piqûres de certaines espèces sont beaucoup plus dangereuses, les araignées constituent un met recherché. Cela laisse songeur sur la logique des humains...
Un dernier pour la route, le même rôle est joué par les chauves-souris, terrifiantes avec leur stature colossale de la taille d'un moineau, qui peuvent capturer chacune plusieurs dizaines de moustiques par nuit.

Concernant Dame Nature, nous évoquions son manque d'assiduité à l'église (cf. "Ici, le cliché, on le prend, on le retourne et ... on le broie menu ! Tome 1") telle une sauvageonne incontrôlable, une hérétique perpétuellement visée par la conversion forcée. Il s'agit surtout d'illustrer cet acharnement à la contraindre à nos lois, nos usages si absurdes soient-ils. Plutôt que de chercher à lutter contre la nature, pourquoi ne pas essayer de l'accompagner voire de se servir de ses formidables ressources ? La Nature a cette capacité à combler le vide. Trop souvent, nous nous opposons frontalement à cette force au lieu de la détourner à notre profit. Soyons judokas.

On remarque d'ailleurs que tout le petit peuple féérique issu des cultures celtiques, païennes et autres suscite beaucoup d'émerveillement ou de sympathie dans les milieux écologistes mais aussi auprès d'un public beaucoup plus large dans les créations artistiques (cinéma, bandes dessinées, illustrations, etc.). Ce n'est que logique dans la mesure où ces créatures matérialisent allégoriquement des propriétés, des forces naturelles parfois craintes mais toujours respectées et souvent vénérées. Chaque tronc, chaque souche, chaque libellule ou salamandre renferme un esprit, un lutin, un petit être magique, chaque montagne a ses trolls, ses dragons, toutes créatures en parfaite adéquation avec la vigueur, la puissance, le génie sauvages.

Ah! Quelles fariboles n'écrirait-on pas pour justifier la publication de quelques croquis et aquarelles...
Enfin, vérifiez-bien tout de même qu'aucune nymphe ne se cache dans le tronc d'un arbre avant de le couper, qu'aucune mante religieuse douée de parole n'est camouflée dans les quelques hautes herbes que vous allez faucher, qu'aucun gardien salamandre ne surveille l'accès à la cavité d'une vieille souche... On ne sait jamais.

PS : Cet article avait un précédent !

Ici, le cliché, on le prend, on le retourne et ... on le broie menu !


Dame Nature, elle est bien jolie mais bon, franchement, elle pue un peu des bras... Z'avez pas remarqué? Hein?! Tout de même ! J'ai l'impression qu'au niveau propreté, c'est pas trop ça. Et je sais pas ce que vous en pensez mais moi, j'ai pas remarqué une assiduité ahurissante dans les églises... Elle est sympa mais bon, je préfère garder mes distances, elle n'a qu'à se promener un peu plus loin là-bas, hors du village, après le périphérique...

Caricature-je? Mmmhh, vraiment ?! Regardons donc bien au fond de notre inconscient. Faire propre, nettoyer une parcelle ne sont-elles pas des expressions que nous employons à la place des plus neutres tondre, couper, faucher, etc ? Pourtant toute plante en croissance contribue à purifier la surface qui l'héberge : elle est capable de prélever certains éléments polluants, de les neutraliser voire de s'en servir à l'élaboration de sa propre matière. Un recyclage que nous sommes bien incapables de maîtriser à ce niveau d'excellence. A tel point que l'on utilise les plantes pour dépolluer certains sols invivables pour nous et à cause de nous.
Comble de l'absurde, de l'inouï, du scandale et de toute une tripotée de mots aussi radicaux que je vous laisse le soin d'employer, on dit même d'un coin de terre éclaboussé de produits chimiques qu'il est désormais propre. Faut-il en rire? On s'empoisonne, on éradique, on terrasse, on contamine, on pollue et ce serait propre par dessus le marché?
L'entourloupe continue par le choix pernicieux des mots nommant les maux en question. Les produits chimiques sont avantageusement nommés "phytosanitaires". On veut par là signifier : concernant la santé des plantes. Ah, pour sûr, le terme est flatteur. Mais si l'on habitue les plantes à cette souillure, elles deviennent des assistées, affaiblies, rompues à nos soins, sous notre dépendance, incapables de développer leurs propres résistances. Boiteuses avant même d'apprendre à marcher. Et donc en demande de toujours plus de soins et d'attentions... C'est le cercle vicieux infernal.
Que dire de l'imparable "pesticide"? Comment oserions nous être contre le produit qui repousse la peste (en fait, les "ravageurs" plus exactement) ? Mais de quelle peste parle t-on au juste? Des hérissons, des carabes et des oiseaux qui s'empoisonnent alors qu'ils nous aidaient à lutter contre quelques ravageurs justement ?
Sérieusement, le terme de "biocide" ("qui tue la vie" mot à mot) est plus approprié. Il nous indique de façon plus objective que nous utilisons ce qui ressemble plutôt à une arme chimique. Oui, une arme. Qui induit une souffrance, des dégâts. Une arme ne s'utilise pas à la légère. Voire pas du tout.

Guillaume.

PS: l'image est moche (les ambitions esthétiques du blog ne vont pas dans ce sens), j'en ai bien conscience mais comment susciter l'émerveillement avec une photographie de terre aspergée de biocides?

PPS : concernant l'assiduité dans les églises, suite au cours du prochain épisode...

jeudi 20 mai 2010

Changer de regard...


Premier coup d'œil, première réaction, classique. Guêpe/mauvaise herbe. Vilaine bestiole! Sale plante! Forcément!!
Si c'est ce que vous vous êtes dit, bah, c'est normal. On ne veut, on ne peut pas vous accabler. Le message visuel était pourtant clair. C'est que nous sommes presque formatés pour interpréter ainsi ce qui se veut une alerte. Jaune, noir, jaune, noir, jaune... L'alternance fatale synonyme de danger, d'incitation à la prudence ou suscitant une forte interpellation. C'est gravé dans notre mémoire héréditaire. Tel un caractère inné, un réflexe vital de base: attention!
Et pourtant ! Vous m'avez vu arriver avec mes gros sabots ! Tout faux, forcément (pardon, pour ceux qui s'impatientent surtout s'ils tirent déjà la quintessence de l'image)...
Et les grandes antennes coudées alors? Où sont-elles? Nulle part! Ce n'est donc pas une vilaine guêpe. Et encore faudrait-il organiser un procès équitable en faveur de ces insectes malaimés. Le verdict serait surement beaucoup plus nuancé. Mais c'est une autre histoire...
Notre bestiole est un diptère, plus spécifiquement la Syrphus ribesii en latin scientifique idoine.
La rusée bestiole tente, certes de fourbe manière, de susciter la crainte en empruntant la célèbre tenue effrayante que l'on affublait même de force à certains frères bandits du grand Ouest américain pourchassés sans relâche par l'homme plus rapide que son ombre. Mais l'habit ne fait pas la guêpe et cette syrphe se révèle paisible butineuse, alliée incontestable de l'homme pour la pollinisation de fleurs sauvages ou cultivées. Mieux, les larves de cette trop modeste bestiole s'attaquent aux pucerons avec une avidité sans faille. Un peu plus et on l'aplatissait sans un tressaillement de sourcil, sans l'once d'une amorce de pseudo-remord potentiel.

Mais me direz-vous, la belle (car oui, osons désormais reconnaître que la fatale alternance bariolée possède un charme certain si l'on se débarrasse de préjugés psychologiques encombrants et paralysants) butine une fleur sauvage ! Elle va permettre la multiplication d'une mauvaise herbe que nous nous efforçons d'éradiquer comme tout le monde le ferait logiquement.

La plante est pourtant un comestible réputé : le panais. Fort appréciée par votre rédacteur et par les anglais (il faut bien leur reconnaître quelques qualités). Ses qualités esthétiques sont même recherchées par nombre de jardiniers : la famille du panais autrefois poétiquement nommée "ombellifères" comporte les fameux carvi, fenouil, aneth, etc.

Quand on ajoute à cela que le terme males-herbes signifiant à l'origine herbes aux maux (plantes médicinales) a été mal transcrit pour donner celui de "mauvaises herbes". Que ces males-herbes foisonnent littéralement tout autour de nous à condition que l'on ne les arrache pas, qu'on ne les éclabousse pas de produits chimiques, etc.
Eh bien, on se retrouve cerné par une foule de plantes bienfaitrices, elle-mêmes assaillies par une nuée de créatures utilissimes.

Maintenant, vous savez...

Guillaume