mardi 9 février 2016

Les Zespèces Zinvasives

Qu'est-ce donc qu'une espèce invasive ?
Une plante propagée par les armées en conquête ? Non, pas spécialement mais c'est un cas possible.
Une espèce mutante de rat géant aux ordres d'un scientifique despote et bidouilleur de génétique aux velléités hégémoniques ? Encore moins.
Il s'agit d'une espèce exotique introduite volontairement ou non et dont les populations se développent vitesse grand "V" sur leur nouveau territoire, souvent au détriment des locales.
La ronce du coin a beau être vigoureuse et souvent qualifiée d'envahissante par les jardiniers, elle n'en est pas.

Le naturaliste classique est rarement fanatique de l'invasive et lui colle plutôt l'étiquette de grande méchante à abattre. Wanted. Dead or Alive. Prime de 10 000 dollars à la clé.
Ce qui le dérange, c'est la propension de certaines (mais pas toutes pour être honnête) à nuire aux espèces locales.
Force est de reconnaître que le naturaliste ne prolonge pas cette lutte implacable de l'univers de la biodiversité vers celui de la grammaire.

En effet, on observe, dans les discours des amoureux de la nature, la prolifération des Zespèces invasives... Elles menacent de disparition les Tespèces, Fespèces, Kespèces, HHespèces et même les Nespèces.
Les Zespèces sont originaires de différentes régions dont les plus célèbres sont les méandres du 2 (22, 32, 42...) et les monts du 3 (23, 33...). Mais on en trouve aussi dans des vallées plus mystérieuses comme celles des multiples solitaires de 20 et de 100 (80, 200, 300 mais pas 81 ni 204).
Ce sont les locuteurs qui les ont implantées durablement dans d'autres contrées grammaticales.


Le mode opératoire de leur prolifération linguistique est simple. Dès qu'un orateur est sous leur influence, les Zespèces s'insinuent entre le chiffre et le nom. Elles l'obligent à prononcer un Z là où il ne devait pas y en avoir. Et voilà notre pauvre bougre contraint de produire une liaison dangereuse. Toutes les liaisons naturelles qui avaient donné le jour aux Tespèces, Fespèces, Kespèces, HHespèces et Nespèces sont ainsi supplantées.

Disparues les cent espèces prononcées Tespèces. Idem les neuf articulées Fespèces, etc.

Bon, ne croyez pas pour autant que je vais vous donner une leçon de grammaire. Point du tout. Certes, au début, j'avoue, j'ai failli faire mon gros malin et puis je suis allé vérifier quelques règles (par exemple, ici) et comme toujours avec le français, j'ai découvert quelques exceptions qui m'ont bien douché.

Et puis, je vais pas non plus me fâcher avec mes chers collègues naturalistes...

D'ailleurs, on me souffle à l'oreille que les économistes européens ne font pas mieux en laissant disparaître similairement de nombreux Teuros, Feuros, Keuros, HHeuros...

Guillaume.

PS : si je mange l'un des champignons ci-dessous (vous aurez enfin la paix !), combien restera-t-il d'individus ?  Réponse : X individus à prononcer à voix haute !