mercredi 2 janvier 2013

Rose : la couleur de la révolte ! - épisode 7 (témoin 4 : la Tachinaire)

Épisodes précédents :
1- Le Chardon est-il aussi abominable qu'on voudrait nous le faire croire ?
2- Quelles forces permettent au Chardon de subsister malgré les conditions hostiles que nous instaurons à son encontre ?
3- A qui profite le Chardon ? Les butineurs pour commencer !
4- A qui profite le Chardon ? Aux papillons !
5- Le témoignage du Morosphinx en faveur du Chardon et des fleurs qui lui ressemblent.
6- Le taon blanc



Chère Maman, cher Papa,

Voilà maintenant plusieurs semaines que vous n'aviez plus de nouvelles de ma part. Depuis le 28 septembre 2012 pour être exact, date de mon premier et dernier reportage au sujet du chardon pour la télévision.
Mes chers parents, excusez-moi et ne m'en veuillez pas ! Il se peut que vous ayez du mal à l'accepter mais je vis une histoire incroyable ! L'amour ! L'amour était dans le pré !
Oui, mes chers aïeux, je suis tombé amoureux ! Le mieux pour vous en convaincre, c'est encore de vous présenter la belle. Je suis sûr que vous me pardonnerez en constatant sa beauté sans pareilles :

Tachinaire sur chardon.


Son nom sonne comme une douce mélodie : Tachinaire...
Coup de foudre dès la première rencontre. Sous son air bougon et ses soies grossières, se cache une inoffensive petite bête presque pacifique : mon aimée ne se nourrit que de nectar. Certes, sa progéniture qui s'accroche à la première larve de passage, la dévore vivante, de l'intérieur. Mais elle a abandonné depuis déjà plusieurs semaines ces pratiques un tantinet cruelles mais si utiles au maintien des équilibres naturels (1). Ses lèvres proéminentes (en réalité, son péristome !) sont garanties sans botox ajouté ! Et lorsqu'elle me lance un regard amoureux, ce ne sont pas deux mais bien des centaines d'yeux (ommatidies) qui m'admirent passionnément.


Je n'ai pu risquer de vous la présenter avant son témoignage en faveur du Chardon rebelle, Robin des champs, de peur de compromettre sa présence au procès. C'est l'un de ses amis qui a généreusement pourvu à son alimentation, un indispensable à sa survie.
Mais surtout, oui, je dois l'avouer, j'ai peur des préjugés que notre relation pourrait provoquer. Si notre amour ne peut que se vivre, pour d'évidentes raisons d'incompatibilité physiologique, selon un mode platonique, je ne compte pas pour autant revenir en arrière au risque de vous déplaire. Elle m'a ouvert les yeux sur un nouveau mode de vie. Pour moi, il n'y a plus de mauvaises herbes (et pas plus d'insectes inutiles) mais des plantes hôtes pour les arthropodes. Et le Chardon en fait partie.

Papa, je te suis reconnaissant d'avoir fait ton possible, à ta façon, en me pistonnant à la télévision mais si tu veux vraiment aider ton fiston, utilise tes relations afin d'offrir une meilleure image des espèces sauvages qui tentent de vivre au plus près des hommes.

Et puis tu sais, si tu veux investir dans une communication rentable, sache que ma dulcinée est une vraie vedette ! Une double page lui a même été consacrée dans l'extraordinaire numéro 84 "Frissons d'ombelle" de la célèbre revue La Hulotte, la plus lue dans les terriers.

Je quitte mon poste de reporter et m'apprête à changer de vie. Je vais me consacrer à protéger cette vie sauvage que je découvre émerveillé. SNIF ! Je me sens déjà mieux de vous avoir dit tout cela et j'espère que vous l'accepterez...

Bises,

Philistin de Jolibourg.

(1) rôle d'auxiliaire du jardinier