dimanche 24 avril 2011

Chronique d'un déclin annoncé

On n'a pas tout de suite compris ce qui nous arrivait. Tout ce que l'on pouvait voir, c'était un champs dévasté. J'apercevais bien quelques inflorescences rescapées par ci par là, mais tout le reste avait disparu. Une forêt de tiges étêtées, rien de plus. J'étais complètement désemparée devant ce spectacle de désolation. Je n'avais jamais vu ça de ma vie. Qu'est-ce qui avait bien pu se passer ? Quelle force surnaturelle avait bien pu engendrer un tel désastre ?

Je suis rentrée au radar, groggy. J'en ai immédiatement parlé à toutes celles que je croisais sur mon chemin. D'autres sont revenues, plus tard, avec des informations qui confirmaient mes dires. Ça aurait pu s'arrêter là, mais nous découvrîmes rapidement que le cauchemar ne faisait que commencer. Ce champs  n'était pas le seul à avoir subi le même traitement. Plusieurs de nos parcelles n'étaient maintenant plus exploitables. Elles avaient toutes été rasées, semble-t-il par le même procédé.

Un certain nombre d'entre nous, les plus jeunes surtout, se mirent à s'agiter. Je pris la parole et demandai le silence. Il allait falloir nous organiser afin de savoir ce qui causait la perte de nos récoltes. Plusieurs groupes furent envoyés sur les parcelles supposées encore intactes. Les autres reprirent les tâches quotidiennes, s'occupant l'esprit pour éviter de réfléchir.

La journée était bien avancée lorsque je découvris, avec l'une de mes sœurs, l'origine de la catastrophe. C'était une créature gigantesque qui poussait devant elle un engin vrombissant, une machine infernale qui avalait peu à peu tous les fruits de nos efforts, ne laissant derrière elle que de malheureux brins coupés au ras du sol. Comment ne pas rester tétanisées devant cette vision d'apocalypse ? La machine était diablement efficace ! Il ne lui fallut que peu de temps pour saccager intégralement un champs que nous avions minutieusement récolté pendant de si longues journées.

Nous revînmes faire notre rapport aux autres, et nous prîmes la décision d'alerter la Matriarche.

Avec un air grave, celle-ci  nous expliqua qu'il en était ainsi chaque année, à la même époque, et que dorénavant, nous allions devoir redoubler d'efforts pour ramener la ressource à la Ruche. Que les plus faibles d'entre nous allaient mourir d'épuisement. Que la période faste était terminée...


samedi 16 avril 2011

L'attaque qui tue pas trop, en fait ! Le retour...



Or, doncques, dans l'épisode précédent, nous nous trouvions dépourvus et tétanisés face à l'horreur verte en ordre de marche, prête à envahir à notre insu, nos magnifiques trottoirs et espaces verts "bien" entretenus. Sommes-nous donc condamnés ? Personne pour les arrêter ? Ni héros ? Ni champion ?

Ah ! Mais si ! Voyez cette silhouette rassurante se dresser face à la sournoise menace !  Rassurez-vous, les hordes de créatures vertes se font bien massacrer la tronche ! Contrairement aux films d'épouvante, la technologie humaine les décime avec une déprimante efficacité.
Même pas de suspense hitchcockien, c'est réalisé sans aucune finesse. Un vrai film de bucheron ! Sauf que le mec qui tient la tronçonneuse, là, il est censé nous défendre... Ce ne serait pas lui, cette fois-ci, le dangereux tueur ?

Invariablement, aux beaux jours, il procède à une régulation efficace des envahisseurs verts. Tout au plus, quelques placettes oubliées par miracle échappent au carnage.

Le truc, c'est que dans le lot, les orchidées sauvages morflent elles-aussi : plus de 35 espèces sauvages rien qu'en Ile-de-France ! Et beaucoup pourraient pousser si nous leur en laissions un peu le temps. Même sur des bords de route, dans nos jardins, etc. Mais si ! J'ai des preuves ! Cela n'arrive pas qu'aux autres.

Habituellement, le ton de ce blog n'est pas trop déprimant. Alors, non, je ne vais pas vous laisser assommés de désarroi paralysant. Je vais vous proposer encore une fois de passer à l'action.

Voici à quoi ressemble en ce moment (sortie d'hiver) une orchidée sauvage. Une rosette de feuilles basses et luisantes, aux nervures parallèles :




Mais cela peut devenir aussi cela :

Fleur d'Orchis militaris.


Bon là, j'avoue que ça peut vraiment ficher les jetons. Je comprends le mec à la tronçonneuse. Nue et casquée comme un fier spartiate, la fleur de l'Orchis militaire en jette en combinaison moulante de strass rose. Si l'on ajoute à cela son imposante stature de plus de deux centimètres. Parbleu ! J'en frémis déjà.




Mais on franchit encore un palier dans l'horreur avec les fleurs de l'Ophrys Goldorak, ci-dessous, véritable machine de destruction, condensé froid de technologie brute et insensible, venue du futur pour nous exterminer, nous pauvres humains apeurés et innocents:
Fleurs d'Ophrys insectifera : environ 2 cm chacune.


Floraisons prévue en mai !!

Et je vous jure que ces deux créatures peuvent pousser toutes seules pas loin de chez vous.
Alors si vous en avez le courage, laissez-les donc pousser.
Cap' ou pas cap' ?

PS : merci à Olivier pour son vengeur masqué rassurant. On lui ferait bien un bisou, tiens !

lundi 11 avril 2011

Auprès de ma Berce, qu'il fait bon, fait bon, fait bon... 5ème

Suite de nos découvertes entomologiques sphondyliennes !

OUCH ! PAN ! Hé ! Excusez du peu mais là, c'est du titre qui déchire. Pour briller en société et faire le malin avec des expressions pédantes et alambiquées, tout est là, concentré en un mot tout à la fois énigmatique, épique et pompeux. Sphondylien.

Mais bon, il s'agissait en fait de vérifier le niveau d'assiduité des lecteurs. "Oh ! Hé ! La pauvre excuse pour se sortir du gouffre !!" Certes, je me suis mis dans ce ridicule pétrin tout seul mais je pose la question. A quoi se rapporte ce mot? Réponse à trouver sur la page suivante : Auprès de ma Berce, qu'il fait bon, fait bon, fait bon... 1ère partie.


Revenons-en à nos mou... ches !
Aujourd'hui la famille des Tachinides. On commence avec Cylindromyia bicolor. Avec sa robe rouge et sa silhouette élancée, elle aurait tôt fait d'afficher de grands airs de starlette. J'avoue avoir succombé à son charme et abandonner tout esprit critique pour tirer l'affaire au clair.


Jusque-là, tout va bien. J'entends vos neurones marmonner : "Mouais, bon, on le connais, il est un peu bizarre. Une mouche rouge, c'est tout lui, ça ! Si ça lui fait plaisir ! Ne le contrarions pas! Laissons-lui un petit message sur le blog. Du genre : "certes, elle est originale!" C'est neutre, il ne le prendra pas mal."


Attendez un peu que je vous présente le coup de cœur suivant !


Moins distinguée : Tachina grossa, la grosse bourrue,  dénommée Tachinaire hérisson géante dans le fabuleux numéro 84 de La Hulotte, "Frissons d'ombelles". C'est le colosse de la famille ! Elle atteint les 2 cm de long ! Son corps hirsute et sombre, laisse échapper une tête jaune comme une alerte au danger.
 
Son aspect inquiétant s'accorde d'ailleurs avec ses mœurs de grand escogriffe. Il faut bien reconnaître que sa jeunesse n'est peut-être pas un exemple à suivre pour nos chères têtes multicolores. Si la larve n'a commis qu'un écart dans sa vie, il est certes de taille. En effet, après s'être accrochée à une innocente chenille passant à sa proximité, elle s'est introduite dans son corps pour la siroter vivante, de l'intérieur.

Si nos yeux d'humains n'y voient qu'un crime dégoutant, le jardinier reconnaîtra deux atouts à la grosse bourrue :
- primo, elle régule les populations de chenilles en évitant les surpopulations qui nuiraient aux plantes (la nature est bien faite, non?)
- secundo, à l'instar des bourdons qu'elle imite pour qu'on lui fiche la paix (tous en cœur ! la nature est bien faite !), elle contribue à polliniser les fleurs qu'elle visite (la foule en liesse, briquets allumés ! La nature... Lalalère...).

BZZZIIT !! CCRRUUSSCHCHH ! DDDZZZZITTT !
"Ce n'est pas une attaque d'une escadrille de tachinaire ! Ne touchez pas à votre transistor ! L'interruption suivante est indépendante de notre volonté. 
Le Comité Officiel des Scientifiques Annihilateurs de Controverses (COSAC) tient à préciser : "Le rédacteur use et abuse des pires stratagèmes de manipulation mentale ! Après avoir feint d'ignorer l'importance du crime abominable commis par Tachina grossa, le rédacteur s'emploie de façon sournoise et perverse à maquiller la monstrueuse bête d'atours écologistes notoirement propagandistes. Nous condamnons une nouvelle fois l'impardonnable malhonnêteté des procédés employés dans ce blog avec la plus grande fermeté."

Rhhooo ! Là ! Là ! Dis-donc, le rabat-joie... PAN ! Aïe ! Euh ! Oui, pardon, Ô tout-puissant et vénéré CASOC ! Paf ! Ouille ! Pardon, COSAC ! Je suis contrit de remords et de honte ! Je suis infâme !

Hum ! C'est bon, les pontes du comité sont partis. PSST ! Approchez ! Je vous le dis à l'oreille. Je serais vous, j'essaierais tout de même de laisser pousser des berces. Je ne suis pas obsédé par les dévoreuses de chenilles mais croyez-moi, c'est le bon plan pour le jardin !
Si on y ajoute l'arrivée de ces imitatrices des guêpes (sans la capacité de piquer) : les syrphes pollinisatrices dont les larves croquent les pucerons... Vous voilà bien armés pour vous tourner joyeusement les pouces. Du temps à en revendre pour observer à foison bien d'autres bêtes et insectes multicolores sur nos chères ombelles.

Bon, pas un mot au COSAC, hein ? A vous de jouer !

Un dernier portrait pour la route de Tachina grossa. Charmante, non?